Il y a 20 ans, tout était plus simple : il y avait d’un côté la majorité écrasante des vins issus de l’agriculture conventionnelle, et de l’autre « Le Bio du village » le vigneron qui, tout seul dans son coin et un peu reclus, continuait à faire son vin sans produits chimiques, et parfois même privé d’AOC pour ses vins jugés « hors norme ».
Après 20 ans de croissance à 2 chiffres de la consommation de vins bio chaque année, et l’explosion des conversions de viticulteurs, le bio paie aujourd’hui la rançon du succès avec la multiplication des niches et des revendications, qui relève parfois de la querelle de clochers, autour de savoir qui sera le plus « naturel ».
Pour s’y retrouver entre ces différents termes et terminologies, il faut d’abord comprendre que c’est avant tout une affaire de hiérarchie légale :
Le label Bio AB (Agriculture Biologique) est la seule norme européenne légale en vigueur en France pour les vins.
À l’apparition des premières normes en 1991, seul le raisin devait être « issu de l’agriculture biologique ». Mais depuis août 2012, le label encadre aussi la vinification et les vignerons doivent respecter la liste des produits autorisés en cave pour transformer leur raisin en vin. Cette liste, qui répond aux demandes des producteurs de toute l’Europe, est contestée par de nombreuses organisations de vignerons bio en France, qui la trouvent trop laxiste.
Certaines appellations s’appliquent des règles plus strictes que la norme européenne. De nombreux vignerons ne sont « que » Bio, car ils sont satisfaits du résultat obtenu, comme par exemple Catherine et Pierre Breton (Loire).
D’autres pratiquent en plus la Bidodynamie, pour laquelle il faut d’abord être certifié bio. Mais la Biodynamie n’est pas un label, c’est un cahier des charges. C’est une déclaration auprès des organismes chargés de certifier le bio comme Eccocert, Demeter, ou Nature et Progrès, qui vérifient l’emploi des produits et des méthodes prévues par les principes de la Biodynamie, conceptualisées et édictées en 1924 par l’agro philosophe autrichien Rudolph Steiner.
En quoi ça consiste ? Pour faire court, la Biodynamie est un ensemble de pratiques destinées à stimuler la vigne et les sols par un mélange d’herboristerie (tisanes, décoction) et de produits naturels à doses homéopathiques.
Quel est son effet réel ? Vue de l’extérieur, elle suscite des réactions de rejet comme celles exprimées récemment par Michel Onfray. Mais ceux qui la pratiquent au quotidien depuis des années en sont très satisfaits, à commencer par les pionniers de l’association « Renaissance des Appellations » de Nicolas Joly (la Coulée de Serrant, Savennières) ou ceux de l’association Biodyvin… Leur qualité est-elle due aux pratiques naturelles ou aux décoctions de plantes et à l’homéopathie ? Totalement empirique et ne reposant sur aucune étude scientifique tangible, la Biodynamie vise la symbiose avec la nature.
Le nom de la méthode se retrouve dans le « dynamiseur » utilisé pour mélanger les préparations : c’est une cuve en cuivre équipée d’un mélangeur de particules ressemblant à un robot géant pour battre les œufs en neige. Le vigneron disperse ensuite les extraits de plantes (comme l’arnica, qui sert à soigner les bosses des enfants) ou des microparticules de terres fertilisées par une macération dans une corne de vache en quantité infinitésimale (homéopathique) sur ses vignes et ses sols, pour stimuler les défenses immunitaires et la productivité des ceps.
Faut-il y croire ou pas ? Force est de constater que les vins en Biodynamie rencontrent un public de plus en plus nombreux.
Ce terme vin « Nature » fleurissait jusqu’au mois de mars 2020 sur les bouteilles dans une liberté totale, au gré du bon vouloir des vignerons, les sincères mais aussi ceux qui en avaient perçu la valeur commerciale. Car la seule promesse à peu près admise du « nature » était de ne pas mettre de souffre, les fameux « sulfites » annoncés sur les bouteilles, dont l’abus donne mal à la tête et que la viticulture conventionnelle utilise en grosses quantités comme stabilisateur avant commercialisation.
En tuant toutes les levures résiduelles, le souffre évite au vin qu’il ne reparte en fermentation, potentiellement jusqu’au vinaigre. Là où les « conventionnels » peuvent en mettre jusqu’à 200 mgr/l, notamment dans les blancs, les bio ne dépassent pas en général les 20mgr par litre. Les adeptes du « vin Nature », eux, l’éliminent quasiment complètement, tout comme les vignerons bio qui proposent des cuvées « sans souffre » dans leur gamme, comme le Château Le Puy et sa cuvée Barthélémy.
Le seul problème d’une appellation sans règle écrite était que, pour supprimer le souffre, certains vignerons « Nature » avaient recours à des méthodes peu orthodoxes comme la filtration stérile, un tamis qui permet d’extraire du vin toute particule vivante au moment de la mise en bouteille…
L’an dernier, les adeptes du « vrai » vin nature ont déposé une cahier des charges volontaire qui vient d’être reconnu par les autorités au début de l’année : autour du vigneron Jacques Carroget du Domaine de la Paonnerie (44), de Sébastien David (Loire) ou encore de Christian Binner (Alsace), ce groupe de vignerons a créé les « Vins méthode Nature », ouvert aux vignerons en Bio qui s’engagent à supprimer la plupart des produits autorisés même en bio, et à vinifier sans souffre (seule une petite dose est admise à la mise en bouteille occasionnellement) : vendanges manuelles, levures indigènes, aucun intrant. Du « super bio » ?
Les vignerons indépendants en « bio », en « Biodynamie » ou en « Nature », revendiquent non pas une méthode, mais une philosophie : devant le succès de toutes ces méthodes naturelles, la principale menace est que les lobbies ne fassent pression pour assouplir les règles derrière ces normes naturelles, pour y faire entrer des vins qui ne méritent pas aujourd’hui ces certifications…
Et vous ? Que pensez-vous de ces tendances ? Nous vous invitons à vous faire votre propre avis en découvrant notre sélection des meilleurs vins bio et biodynamiques.